saveurs molles - 1 chaque jour

Ecriture, écritures : en solo ou en collectif, ici on aime lire et écrire.

Modérateur : drÖne

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6. saveurs molles, jour 1

il y a ce vieil homme qui fait les poubelles, et, plus loin dans la rue, cet autre vieil homme qui dort dans une cage d'escalier. Ils ne savent pas qu'ils sont observés. Mais enfin ils sont observés, c'est comme ça.
le quartier est presque en ruines. a l'entrée, il y a des plots en béton pour barrer la route aux voitures qui voudraient entrer, ou à celles qui voudraient sortir ; les affiches explicatives sont quant à elles lacérées et illisibles. Qu'importe, chacun sait à quoi s'en tenir. Au lever du soleil, c'est beau : les premiers rayons glissent sur les tapis de verres brisées, et cela produit des illuminations somptueuses. Mais ici, tout le monde s'en fout ; ceux qui ne s'en foutent pas sont morts, ou alors vivent ailleurs.
le vieillard qui fouille les poubelles opère de manière systématique, passant de l'une à l'autre sans faire de pause, plongeant les mains, fouillant le visage enfoui là-dedans, ne remassant rien, recommençant ; il a l'oeil hagard des fous urbains, il empeste l'alcool, il mourra d'ici quelques mois, d'une hépatite, ou plus simplement de froid.
l'autre dort, et pue ; ce sont ses deux activités principales.
plus tard, dans la soirée, ils vont boire et rire d'un rire sonore, leur haleine sentira le vin conditionné en bouteille plastique, et rien d'autre. c'est terrible comme ils se ressemblent, la même carrure, les mêmes guenilles marron, jusqu'aux ongles noirs et écaillés.
beaucoup plus tard il fera nuit. leur feu de fortune, devant lequel ils buvaient, un feu fabriqué à partir de madrier et de cageots récupérés, et arrosé d'essence, sera éteint, et même les cendres seront froides. Il y aura très peu de bruits, hormis les ronflements des deux pochards, qui dormiront à même le sol de l'immeuble en ruine, entourés de gravats, de poussière, de verre brisé et de merde de rat. La plupart des clochard glisse un carton entre le sol et leur corps, pas eux.
dans la nuit l'un des deux fera un cauchemar. dans son rêve, il se lèvera et ira donner de violents coups de poings au visage de l'autre, qui ne se défendra pas. le poing fera éclater la peau, déchaussera les dents déjà malades, fera gicler du sang, pochera les yeux qui imploraient.
le clochard se réveille, un peu mal à l'aise d'avoir fait ce rêve, sa conscience subit un genre de soubresaut ; il attrape la bouteille mais elle est vide ; il cherche son compagnon mais il n'est plus là. il se lève, va pisser. Il extrait son pénis puant de plusieurs épaisseurs de guenilles, et arrose un platras répendu au sol.
quelque chose brille un peu dans le blanc crasseux du platre. il se penche, si c'est une pièce il la boira, il sourit à cette perspective ; il avance sa main sale vers l'objet, ce n'est pas une pièce mais un anneau, un petit anneau comme une alliance. il le prend entre ses doigts, le tourne, c'est un vulgaire anneau en étain, il le fourre dans un poche en laissant échapper un petit rire bête hhhéééé héh hhhééé ; c'est pas tout ça mais il a soif.

ANNEXES :

1 :

ils seront une armée d'une centaine, très bientôt, une centaine à réclamer vengeance d'un meurtre odieux.
beaucoup se poseront la question : mais qui a bien pu donner l'idée à ces loques, à ces rebuts parqués dans des ruines, l'idée d'une telle rebellion ?
le fait-divers qui déclenchera les émeutes est passablement horrible : il s'agira d'un clochard semblable à ces deux-là, peut-être l'un des deux, qui sera torturé et tué de manière horrible, en manière d'amusement, par des collégiens. l'un de ces enfants se trouvera être le fils d'un ministre, il n'en faudra pas plus pour déclencher une guerre civile emmenée par les gueux.

2 :

un anneau
qui aujourd'hui connaît son histoire, qui se souvient de sa fonction ?
il servait de signe de reconnaissance, et à l'époque nombreux étaient ceux qui le portaient.
mais l'époque est révolue, et l'anneau d'étain oublié.
il y avait une société secrête, dont la principale occupation était d'emmurer vivants des hommes, à la demande d'autres hommes, et moyennant finance. en fait ça c'était la partie visible de leur travail ; la partie cachée l'était grandement, et même au sein de cette société sans nom peu nombreux connaissaient la vérité.
la vérité, c'est que les emmurés ne mourraient jamais. des mots adéquats, écrits à l'acier sur leur peau, leur garantissait une vie éternelle, sans pour autant les prémunir de la faim ni de la douleur ; ils ne mourraient qu'à la destruction du mur, afin de protéger le secrêt des emmureurs.
espions, oui, mais au compte de qui, et dans quel but ? encore moins de gens le savents ; certains fous prétendent des choses, mais il ne faut pas écouter les fous.
en tout cas, là où traine un anneau, forcément il a traîné un emmureur ; et on raconte des choses au sujet des anneaux, des rumeurs bizarres, quelquefois violentes.

3 :

c'est en 2011 que la loi popularisée sous le nom élégant de "loi des bites" entre en vigueur.
elle est très simple en fait : les anciennes ZUP sont déclarées zones sinistrées ; la police ne s'y rend plus, et des plots en ciment sont installés pour empêcher les voitures d'entrer ou de sortir des quartiers déclarés sinistrés. les fameuses bites.
la situation se dégrade très vite, et ces quartiers prennent l'aspect d'un pays en guerre, aspect renforcé par l'apparition d'une police des frontières, massivement stationnée en périphérie des zones sinistrée, et contrôlant les allées et venues de façon arbitraire et violente.
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7. saveurs molles, jour 2

c'est une maison est vide
vide de sens, vide de gens, et vide de poussière
vide
des rumeurs l'entourent, et des murmures
dans des bistrots de banlieue le soir des bouches se délivrent
on murmure des noms toujours différents et souvent hauts placés dans la hiérarchie sociale
on sait bien que personne jamais n'a jamais tourné aucune clé dans la serrure ni pour l'ouvrir
ni pour la fermer
on sait très bien que jamais aucun courrier n'a attendu dans cette boite aux lettres
nul grincement pour le parquet
des noms et des énigmes s'échangent sur des tons de confidence
quelquefois la rumeur s'étend au voisinage
il y aurait quelqu'un une sorte de vieux fou qui accumule les journaux
tout s'entasse jauni dans un classeur usé
celui qui lirait ça celui là saurait tout
les mystères sont là en encre délavée
et pour qui sait déchiffrer la poussière il y a la vérité

ANNEXES :

1 :

mars 2019 : un attentat non revendiqué détruit l'immeuble du numéro 12 de la rue nicolas
flamel
janvier 2019 : un incendie criminel contraint au départ les squatteurs de l'immeuble du numéro 10 de la rue nicolas flamel
été 2018 : intense activité policière dans le quartier des l'ancienne synagogue. patrouilles renforcées, rues barées, arrestations, perquisitions sommaires ; à trois reprises, la rue nicolas flamel est bouclée entre quatre et six heures du matin
juin 2018 : à la suite d'une vente aux enchère, l'immeuble du numéro 12 de la rue nicolas flamel est cêdé à l'état
mai 2018 : décès de pierre decaux, dernier descendant de la famille decaux
1999 : un homme est retrouvé vidé de son sang dans la rue nicolas flamel ; l'assassin ne sera jamais identifié
novembre 1992 : pierre decaux est assassiné lors d'une rixe dans un bar ; le meurtrier n'est pas retrouvé
octobre 1992 : pierre decaux est gracié par le président de la république ; scandale de salon
septembre 1992 : pierre decaux, professeur en biologie, est arrêté pour avoir commis six meurtres pédophiles ; à aucun moment, et sur requête du juge chargé de l'instruction, sa demeure ne sera fouilée.

2 : légendes urbaines

il y aurait en réalité des gens qui qui ont séjournés dans cette maison, mais il ne s'en souviennent plus parce que la police leur a lavé le cerveau.
cette maison sert à deux choses : c'est un lieu de torture et de mise à mort fort prisé par la police, et c'est l'entrée d'un réseau souterrain qui communique avec de nombreuses caves de la vieille ville ; cela sert principalement à dissimuler des preuves chez les gens en vue de leur arrestation.
les enfants qui jouent près de la maison subissent des perversions irréversibles. Sur cinquante tueurs en série arrêtés ces cinq dernières années, huit avaient passé au moins une semaine dans ce quartier au cours de leur enfance.
une bande d'adolescent a organisé dans cette maison des orgies nécrophiles, et tourné des films qui pendant quelque temps ont été disponibles sur internet
cette maison a été bâtie pour servir de code ; il y a des inscriptions sur les façades qui changent régulièrement ; certains groupes secrets communiquent par ce biais
l'argent qui a servi a faire construire cette maison a été gagné en détruisant la synagogue
l'immeuble tout entier a été construit selon des principes magiques ; seul celui qui est à'origine de ce rituel a le droit de rentrer dans cette maison
on ne voit jamais un seul chien ni un seul chat errant à moins de vingt mètres de l'immeuble ; aucun oiseau ne se pose jamais sur le toit. On pourrait rester un mois sans cesser d'observer à la verticale de la maison, on n'y verrait jamais un ciel pur sans nuage, quelque soit le temps.
depuis l'intérieur de la maison, on ne perçoit aucun éclairage extérieur. comme si la maison était hors de l'espace
la police sait ce qui se trouve dans la cave. c'est quelque chose qui les aide à enquêter, quelque chose qui connaît des souterrains secrets pour espionner les gens ; mais le prix à payer est élevé.
le premier propriétaire n'a construit cette maison que pour y emmurer vivante sa femme.
henri de caulx a été brûlé vif après qu'on eut découvert le sort qu'il avait réservé à ses enfants : il les enfermait dans des cages de verre sitôt après leur sevrage, et ne les en sortait que pour les nourir fort sommairement. les enfants grandissaient, mais pas la cage, et ils y mourraient, étouffés ou comprimés à mort. ces cages seraient encore dissmulées dans la maison.

3 :

il se lève tôt. à son âge, on ne dort plus beaucoup. il enfile ses pantoufles et traine des pieds jusqu'à la salle de bain. il pisse dans le lavabo, c'est son seul plaisir de veuf.
il traine ensuite des pieds jusqu'au perron, où il récupère le journal. il fait le tour du pavillon, pour ouvrir tous les volets. le soleil ne rentre pas, il est trop tôt. il sera là dans deux heures, et dans trois heures ce sera le facteur.
il déplie le journal, assis à la table de la cuisine, il le lit en écoutant gargouiller le café. avant il écoutait la radio, et puis un jour les piles sont mortes, c'était il y a six ans, trois ans avant c'était sa femme.
il n'y a rien de très intéressant, à part la rubrique nécrologique, qu'il parcours avec gourmandise. il ne se passe pas une journée sans qu'il ne découvre quelqu'un qu'il connaît. généralement, ça le réjouit. il a eu une telle peine quand ça femme est morte, que ça l'a guéri de toute autre tristesse. il laisse échapper un rire, il se sert un café.
il retourne à la chambre ; des menues corvées l'occupent, l'emmènent jusqu'à midi. à midi il se prépare à manger, c'est pas lourd, et il mange en se souvenant d'avant.
la journée passe, il n'y a pas de rythme, juste une platitude qui précède une autre, et le crépuscule pour finir, les volets à fermer, et il faut se coucher. au lit, avant de s'endormir, il relit le journal, ou quelquefois les vieilles lettres de sa femme.
il dépose son dentier, éteint la petite lumière, et s'allonge.
ses yeux brillent quelques secondes dans le noir relatif, les murs vibrent au passage du train de vingt-trois heures dix, et les yeux ne brillent plus : les paupières sont tombées sur une journée sans age.

4 :

poussière et cendre mêlées
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8. saveurs molles, jour 2

jean michel di franco rentre chez lui après un week-end mouvementé. la porte d'entrée est fracturée, toute la demeure sent l'alcool et le vomi, et tout est saccagé. pour autant, il n'appelle pas de suite la police. avant toute chose, il vérifie ce qui a disparu. son ordinateur portable a été volé.
immédiatement, il vérifie les systèmes de sécurité. les caméras ni l'alarme n'ont fonctionné. cela ne peut signifier qu'une complicité intérieure. peut-être la police qui cherche à le piéger, ou alors les services secrets. peut-être même la concurrence.
il déclare l'incident à la police, à son assurance, à sa police privée ; il fait preuve d'une grande affabilité, mais intérieurement il est prêt à tuer. la perte s'élève à cinq cent mille euros, si l'ordinateur n'est pas retrouvé.
l'après-midi il a rendez-vous avec ses patrons.
le soir, son corps flotte pendant un court instant à la surface d'un château d'eau de province, avant de s'enfoncer lentement.

ANNEXES :

1 : blog de josé lopez

là je suis encore en montée. je tape sur cet ordi pour garder le contrôle.
ça fait quinze minutes au moins que j'écris ce qui me passe par la tête et puis que je l'efface.
j'ai envie de tout casser autour de moi. mais j'ai le corps tout plombé. came de merde j'ai le cerveau en vrac mais le corps c'est un sac de ciment.
c'est quoi cette baraque comment je suis arrivé ici ? putain c'est high-tech autour de moi y'a un mec qui dort par terre.
je le connais il était à la teuf avec moi.
la teuf... il faut au moins que je raconte ça sinon je vais oublier.
faut que je me calme. que je me calme. bordel je sens des fourmis au bout des doigts quand j'écrase les touches ça me fait comme des petites décharges éléctriques. putain c'est bon je me branle les doigts.
je reviens de la salle de bain où j'ai pris une douche glacée. après j'ai donné des coups de poings dans le miroir. il a éclaté et j'ai vu plein de reflets de moi et le sang qui coulait. ça a fait des picotements sur la main.
c'était il y a une heure. maintenant je me sens dans un état de légère fatigue et de dépression. il faudrait que me bourre la gueule pour anticiper la redescente. je pourrais aller dormir comme l'autre enculé sur la moquette à mille euros le mètre carré.
j'ai pas toujours été comme ça, moi, j'ai pas toujours été un squatteur ni un violeur de connasses dans les trains de banlieue, j'ai fait l'université moi, et j'ai connu des gens hauts placés. qu'est-ce que je fous dans cette maison à raconter ces conneries ? quel intéret ?
ah oui, la fête. il faut que je raconte la fête, après j'irais refaire mon bandage et j'irais me coucher à côté de l'autre enculé.
on était tous les cinq et on a bouffé des trips et on a bu pas mal de bières. on était dans un appart abandonné, c'était la zone, il n'y a avait pas d'électricité. on avait juste un poste pourri, qui ne diffusait que la radio, et des piles qui étaient en train de nous lâcher. on aurait pu sortir mais sans une thune à part se friter contre des connards il n'y a rien à faire. de toute façon l'alcool et tout ce qu'on avait pris avant ça nous avait bien calmé. on était tous dans le noir dans ce truc qui puait la pisse à picoler des bières tièdes en attendant que les trips montent et que la radio crève. c'est pas mal parti en couilles après. y'en a deux qui ont commencé à se battre pour rire, mais ça a énervé tout le monde, moi je commençais à avoir des hallus tactiles, à sentir des machins ramper sur ma peau ou à sentir mes muscles faire des trucs. les autres commençaient à aller mal eux aussi, il y en avait un qui voulait choper une hache et aller découper quelqu'un, mais où voulait-il choper une hache ce con ? et la bière tournait toujours, à croire que c'était inépuisable.
c'est la radio qui est morte en premier, alors qu'on était tous éclatés en train de triper et de rire méchammant, et l'autre tournait en rond en parlant de découper un connard avec une hache. c'est à ce moment-là que quelqu'un éclate la dernière bouteille de bière contre un mur, de la bière partout et tout le monde qui commence à délirer avec les tessons, un miracle que personne soit mort. l'autre fou qui fait mine (ou pas) de nous attaquer, il faut lui balancer des coups de pieds dans le bide pour qu'il se calme, on s'acharne un peu tous sur lui en rigolant, et puis il arrête de vouloir se battre, je crois qu'il a mal aux couilles.
moi je commence à avoir des hallus visuelles, des taches, des trucs lumineux, les autres bougent plus beaucoup, chacun chez soi, et ça dure un moment comme ça. et puis il y en a un qui suggère d'aller choper de l'alcool quelque part, alors on sort. on traverse des rues désertes, on s'embrouille à cause de l'autre dingue qui plante son tesson dans sa jambe et se met à pisser le sang, on se fout de sa gueule et puis on le laisse là.
la fête est finie, moi je sens que le bad trip me guette, on se sépare, moi je part avec l'enculé qui dort maintenant par terre, et on se trouve ce petit squatt dans les beaux quartiers.
bon qu'est-ce qu'il y a à raconter maintenant ?
j'ai sommeil.

2 : Blog de Paul Herbert

je me sens loin de chez moi, et je m'emmerde. je me suis emmerdé toute la journée, et je continue à m'emmerder ce soir. tous les autres sont je ne sais où à s'éclater avec des call-girls russes aux noms ridicules, et moi je ne suis là comme une andouille à tapoter sur mon ordinateur, et pourquoi ? je ne sais même pas.
je crois juste que ça commence à me taper sur le système, cette vie et ce boulot de crétin. je suis le standardiste le mieux payé de la planête. 10000 euros par mois simplement pour dire "désolé monsieur, mais monsieur xxx est occupé".
oui, xxx. son nom est tout de même assez connu de certaines personnes, ça la foutrait mal qu'ils lisent par hasard les confessions semi-dépréssives de son secrétaire.
10000 euros bien sûr c'est pour couvrir les risques de corruptions. d'un autre côté, c'est tellement trop que à part épargner pour mes vieux jours je peux rien faire avec. pour bien faire il me faudrait une copine à couvrir de cadeaux, mais comment est-ce que je pourrais rencontrer quelqu'un en étant tout le temps en voyage.
ou alors je pourrais faire comme eux, et appeler toutes les filles Irina, en se persuadant que c'est la même. Mais c'est pas ma faute si je trouve ça ridicule.
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9. saveurs molles, jour 2

au journal porno du soir, on reparle de l'enlèvement de patricia lochetti. ce n'est qu'un enlèvement insignifiant, mais l'enquête aurait révélée une accointance entre son mari, enzo lochetti, et certains gangs de trafiquants d'organes. le mari est pour l'instant porté disparu.
il y a quelque part en ville un adolescent qui suit les nouvelles d'un oeil distrait ; il écrit une lettre d'amour. sa timidité l’a vaincu, et lui, en retour, a décidé de la prendre en traitre. la lettre, le courage des peureux. la seule bravoure sera au moment de glisser l'enveloppe dans la boite, le fera-t-il ?
oh oui il le fera.
pourquoi ce futur couple deviendra-t-il un symbole ? sans raison, par hasard, au gré des circonstances comme toujours.
mais le moment est loin ; là, l'adolescent est occupé à trouver une fin drôle, qui puisse être utilisé comme un alibi en cas de trop grand ridicule.

ANNEXES :

1 :

2009 création du journal télévisé porno par la paneuropa : l'audience passe à 92% et dure ainsi pendant six mois. lorsque les autres chaînes suivent le mouvement l'audience retombe à 76% et oscille autour de ce chiffre.
le principe est simple : coupler les deux programmes les plus regardés. le présentateur annonce un accident d'avion en se faisant sucer ; la présentatrice raconte la guerre en branlant deux types ; monsieur météo parle du temps de demain en se faisant fist-fucker ; une éjaculation faciale pour le chroniqueur sportif ; l'envoyé spécial se fait enculer ; l'expert en politique se fait sucer par deux filles et éjacule sur une poitrine opulente ; les invités ont droit à des adolescents des deux sexe tout juste majeures qui les sucent et les branlent ; les gros plans vont du visage aux inserts de reportages à l'acte sexuel ; il faut jouir avec à propos ; la présentatrice vedette se fait faire un cunnilingus en annonçant les titres du journal, elle jouit en fond sonore du premier reportage, souvent consacré à une catastrophe ou une guerre, quand elle à ses règles l'audience prend encore 5 points ; des stagiaires viennent se goder sur le plateau pour combler les temps morts, et sucent leurs accessoires en gros plan caméra pendant qu'un invité parle de son progamme électoral, l'invité se faisant lui-même pomper goulument, ce qui donne à ses discours des accents de vérités qui feront sans doute la différence devant l'urne, et il répond au questions de l'expert qui, accroupi sur le bureau, se fait lécher le trou du cul par un homme et une fille qui en profitent pour entremêler leurs langues ; générique ; publicité ; d'autres programmes.

2 : Blog de Paul Herbert

je viens de regarder le journal pornographique, qui fêtait ses dix ans. ils ont organisé un gang-bang surprise pour la présentatrice.
mouais bof.
sinon je commence à en avoir ma claque de ce boulot, mais c'est pas nouveau ça. aujourd'hui, j'ai fait la nounou. pour une femme. ça n'est pas mon boulot, mais j'ai eu un gros paquet de fric en plus. il faut que je la nourrisse, que je la lave, et si dans trois jours son mari n'a pas rendu un truc, il faut que je la confie aux services de sécurité.
elle n'a pas l'air antipathique. c'est bizarre, dans tous les bouquins que j'ai pu lire, le type, à un moment donné, se fait la gonzesse. par la force, au besoin. moi je n'en ai pas la moindre envie, ça me surprend tout de même.
ça y'est j'ai reçu le planning du tournage. je n'aime pas tellement les tournages, mais celui-là risque d'être sympa. au sud de l'espagne, dans un décor assez chelou, mais bon sinon ça sera toujours la même merde, toujours la même routine.
peut-être que je devrais commencer à réfléchir aux différents moyens de me tirer ?

3 :

il est dans une merde noire. il doit retrouver le cd qu'il a vendu s'il veut revoir sa femme vivante - s'il veut vivre lui aussi.
il ne peut pas sortir, ou presque, à cause de la police qui le recherche.
ses clients se sont évaporés dans la nature. il envisage le suicide, de plus en plus, comme une solution raisonnable, mais repousse à chaque fois cette idée en pensant à ce qu'ils feront à sa femme.
après une nuit blanche, le seul plan acceptable qui lui vient à l'esprit est celui-là : il produit un faux disque, et tente de récupérer sa femme par la force. il lui faut des complices. ça tombe bien, il a des amis qui ne cracheraient pas sur un peu d'argent liquide.
ce soir : il téléphone aux salopards pour prendre rendez-vous.
cette nuit : il retourne à la maison pour récupérer le fric, que ni les poulets ni les salopards n'ont réussi à retrouver.
demain : il recrute quelques gros bras.
il passe une après-midi assez agitée.

4 :

ils seront les premiers morts de la révolution, les premiers. leur premier baiser sera le dernier, et cet événement ridiculement mélodramatique fera le tour du pays.
dans toutes les télés, on les verra s'embrasser dans le hall d'un supermarché, avec en fond sonore les râles sexuels des journalistes, et devant toutes les télés de la viande pensante frémira en voyant les terroristes surgir et tirer sur les amoureux et faucher leur amour.
la viande pensante pleurera, mais c'est pour dans quelques jours. pour l'instant, la viande a les yeux secs.
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blogs, jour 1 :

Frank Darmon :

je me demande si ça craint de tout consigner par écrit ici. d'un point de vue légal, pas grand-chose ne peut m'arriver de toute façon. en mettant les choses au pire, quelqu'un quelque part peut me lire et décider d'utiliser ce que j'écrirai ici contre moi ; et quoi ? me faire chanter, me dénoncer aux flics ?
pour ce que j'en ai à foutre... vu ce que je me, enfin ce que nous nous préparons à faire, de toute façon...
la seule chose qui craindrait vraiment, ce serait que les autorités fassent des liens. Elles ne les feront pas.
bon, commençons par ma situation :
je suis à l'hôpital, je poste ce message grâce à mon laptop personnel, celui qui me permet aussi de rester en contact avec les membres de mon réseau.
dans la bagarre, j'ai perdu l'usage de mes deux jambes et d'une partie de la machoire ; quand je sortirai, ce sera pour me faire électrocuter. Au cours des deux jours de coma qui ont suivi la bagarre, j'ai été jugé pour le meurtre d'un type. Apparemment, j'aurais donné un coup de barre de fer un peu trop fort.
est-ce que je dois parler de la bagarre...
je pense que c'est un peu tôt, il vaut mieux laisser les choses se tasser encore quelques jours, le temps que les liens et les preuves deviennent un peu plus poussiéreux.
de toute façon, dans dix minutes c'est l'heure de mon sédatif. j'espère qu'ils ne me font pas parler durant ces périodes de sommeil chimique...

Louis Merlot :

putain, je pue. ces batards vont me virer de ce bistrot, j'ai intêret à montrer mon profil bas.
aujourd'hui je me suis encore fritté avec jean-pierre. soi-disant que j'aurais piqué sa coke.
comme si j'en avais besoin, moi, de coke. je suis pas une larve toxicomane comme tous ces connards. c'est pas parce que je traine avec eux que je suis comme eux.
je suis grand, moi, je suis le plus grand de cette impasse pourrie de l'histoire. même aux grandes époques j'aurais été grand, pas le plus grand, non, staline quand même c'est difficile à dépasser, mais grands en tous temps ça oui, et maintenant, environné des fruits pourris de 4000 ans de civilisation de merde, quelle difficulté y-a-t-il à être le plus grand ?
bref jean-pierre je lui ai mis un pain dans la tronche, je lui ai cassé le nez (ça fera la deuxième fois qu'il se fait casser le nez ce con, moi je compte plus les fois où j'ai cassé des nez - le mien ? non il est intact le mien, j'ai de grands bras et un cou épais, je ressemble à un singe mais pour tabasser les connards c'est pas si mal), et du coup au squatt ils parlent de me mettre dehors.
pour ce que j'en ai à foutre tu parles. il suffit juste que je trouve une planque pendant encore trois semaines, et après c'est bon.

Baptiste Mattéïs :

je commence ce truc dans l'espoir de dêméler un peu les fils du bordel dans lequel je me trouve. ce n'est pas vraiment destiné à être lu, encore moins commenté, mais, par une bizarre perversion, j'éprouve la nécessité de rédiger mes pensées ici pas sur un calepin.
effet de la mode, sans doute.
j'ai trente-huit ans, je suis divorcé, et mon supérieur hiérarchique vient de tomber dans le coma, il y a moins d'une heure, juste devant moi. Nous étions assis face à face, dans un bistrot, et il m'évoquait une enquête complexe sur laquelle il voulait que je le seconde. Ca signifait une quasi promotion.
l'instant d'après, son visage était écrasé contre la table et du sang lui coulait des oreilles.
plus tard, les médecins ont dit qu'il s'agissait d'une rupture d'anévrisme. quoi que ça puisse être, le désordre ambiant est trop lourd pour le transporter sans risque dans un centre de soins approprié, tout comme le désordre est trop grand pour que le nouveau commissaire prenne ses fonctions immédiatement. pendant une semaine, j'ai en charge ce dossier et toute la boutique par-dessus le marché. et comme si ça ne suffisait pas, j'ai décidé d'aller rendre visite au commissaire chaque jour, pour lui faire mon rapport en quelques sortes. faut être idiot...

Paul Herbert :

je me sens loin de chez moi, et je m'emmerde. je me suis emmerdé toute la journée, et je continue à m'emmerder ce soir. tous les autres sont je ne sais où à s'éclater avec des call-girls russes aux noms ridicules, et moi je ne suis là comme une andouille à tapoter sur mon ordinateur, et pourquoi ? je ne sais même pas.
je crois juste que ça commence à me taper sur le système, cette vie et ce boulot de crétin. je suis le standardiste le mieux payé de la planête. 10000 euros par mois simplement pour dire "désolé monsieur, mais monsieur xxx est occupé".
oui, xxx. son nom est tout de même assez connu de certaines personnes, ça la foutrait mal qu'ils lisent par hasard les confessions semi-dépréssives de son secrétaire.
10000 euros bien sûr c'est pour couvrir les risques de corruptions. d'un autre côté, c'est tellement trop que à part épargner pour mes vieux jours je peux rien faire avec. pour bien faire il me faudrait une copine à couvrir de cadeaux, mais comment est-ce que je pourrais rencontrer quelqu'un en étant tout le temps en voyage.
ou alors je pourrais faire comme eux, et appeler toutes les filles Irina, en se persuadant que c'est la même. Mais c'est pas ma faute si je trouve ça ridicule.

José Lopez :

aujourd'hui : dormi quinze heures.
maintenant, je ne sais pas.
demain : trouver du fric.
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Blogs, jour 2 :

Louis Merlot :

encore une fois dans ce cybercafé de merde, mais cette fois je me suis douché et j'ai changé de vêtements. personne ne me regarde et c'est tant mieux.
la situation s'est arrangé au squat. c'est l'autre merdeux qui est parti. je lui ai dit que je le tuerai s'il ne partait pas alors il a commencé à chercher les embrouilles. je lui ai fait une clé au bras et je l'ai trainé dans ma piole. là j'ai soulevé des trucs et j'ai ouvert ma cachette. il a vu mon calibre, un python. je lui ai montré tout près, je lui ai dit que rien qu'avec la crosse je pouvais l'envoyer à l'hôpital. après je lui ai montré le barillet plein et la il a pigé que j'étais sérieux. avant qu'il parte j'ai quand même piqué son fric, il avait 50 euros c'est toujours ça de pris.
moi, je continue à réfléchir à mes trucs. il me faut des explosifs, et pour ça il me faut de la thune. j'ai deux solutions, soit je peux attaquer une banque soit je peux cambrioler une baraque.
j'ai tiré les cartes hier et elles m'ont dit d'attendre. alors je vais attendre. elles m'ont dit aussi qu'il y aurait un homme fortuné. tu parles, d'ici à ce que je trouve un enculé prêt à me payer pour faire ce que je dois faire, y'a long. pourtant, question retombées, c'est pas de la blague. faudrait que je chope des réseaux. peut-être que par internet je pourrais contacter des gens ? non, c'est pas de la blague les cartes. elles m'ont dit d'attendre, je vais attendre.
ça fait deux nuits que je dors plus. j'ai mal au bide et j'ai la chiasse. ça doit être le stress. j'ai écrit une lettre à ma mère, mais je ne crois pas que je la posterai. faut que je trouve de la coke pas trop coupée. c'est les merdes qu'ils foutent dedans qui me rendent malade aussi bien.
la nuit dernière je me suis balladé à travers tout le squatt, le pif plein de coke, le gun à la main, putain c'était marrant, presque tous ils dormaient où ils étaient défoncés, j'aurais pu les massacrer, j'ai ai mis quelques-uns en joue, j'aime sentir le poids de mon flingue au bout de mon bras.

Louis Merlot :

putain ça sent la bave. j'ai horreur de ça l'odeur de bave. je me renifle de partout, c'est pas moi, je renifle le clavier, l'écran, tous les connards du cybercafé me regardent bizarrement, putain c'est pas l'ordinateur, mais c'est quoi bordel, c'est quoi qui sent la bave ? j'ai horreur de cette odeur, j'ai horreur de ça, quelle chierie, j'ai ça dans le nez, ça veut pas partir, ça sent la bave, putain, la bave, c'est comme si on m'avait frotté un mouchoir plein de bave sous le nez, j'en peux plus merde, de cette odeur, ça me rappelle ma mère, ça me rapelle quand cette salope laissait couler de la salive sur un bout de tissu et qu'ensuite elle m'essuyait une tache sur la joue ou la bouche, et je sentait cette odeur, cette odeur de bave pendant des heures, j'avais beau faire couler de l'eau ça partait jamais, et maintenant je la sens, je la sens encore, comme si ma mère était là alors qu'elle est crevée la grosse truie qu'elle n'est plus qu'un tas de cendre qui bavera jamais plus merde la demi heure est terminée et je sais toujours pas d'où vient cette odeur dégueulasse.

Paul Herbert :

je viens de regarder le journal pornographique, qui fêtait ses dix ans. ils ont organisé un gang-bang surprise pour la présentatrice.
mouais bof.
sinon je commence à en avoir ma claque de ce boulot, mais c'est pas nouveau ça. aujourd'hui, j'ai fait la nounou. pour une femme. ça n'est pas mon boulot, mais j'ai eu un gros paquet de fric en plus. il faut que je la nourrisse, que je la lave, et si dans trois jours son mari n'a pas rendu un truc, il faut que je la confie aux services de sécurité.
elle n'a pas l'air antipathique. c'est bizarre, dans tous les bouquins que j'ai pu lire, le type, à un moment donné, se fait la gonzesse. par la force, au besoin. moi je n'en ai pas la moindre envie, ça me surprend tout de même.
ça y'est j'ai reçu le planning du tournage. je n'aime pas tellement les tournages, mais celui-là risque d'être sympa. au sud de l'espagne, dans un décor assez chelou, mais bon sinon ça sera toujours la même merde, toujours la même routine.
peut-être que je devrais commencer à réfléchir aux différents moyens de me tirer ?

José Lopez :

là je suis encore en montée. je tape sur cet ordi pour garder le contrôle.
ça fait quinze minutes au moins que j'écris ce qui me passe par la tête et puis que je l'efface.
j'ai envie de tout casser autour de moi. mais j'ai le corps tout plombé. came de merde j'ai le cerveau en vrac mais le corps c'est un sac de ciment.
c'est quoi cette baraque comment je suis arrivé ici ? putain c'est high-tech autour de moi y'a un mec qui dort par terre.
je le connais il était à la teuf avec moi.
la teuf... il faut au moins que je raconte ça sinon je vais oublier.
faut que je me calme. que je me calme. bordel je sens des fourmis au bout des doigts quand j'écrase les touches ça me fait comme des petites décharges éléctriques. putain c'est bon je me branle les doigts.
je reviens de la salle de bain où j'ai pris une douche glacée. après j'ai donné des coups de poings dans le miroir. il a éclaté et j'ai vu plein de reflets de moi et le sang qui coulait. ça a fait des picotements sur la main.
c'était il y a une heure. maintenant je me sens dans un état de légère fatigue et de dépression. il faudrait que me bourre la gueule pour anticiper la redescente. je pourrais aller dormir comme l'autre enculé sur la moquette à mille euros le mètre carré.
j'ai pas toujours été comme ça, moi, j'ai pas toujours été un squatteur ni un violeur de connasses dans les trains de banlieue, j'ai fait l'université moi, et j'ai connu des gens hauts placés. qu'est-ce que je fous dans cette maison à raconter ces conneries ? quel intéret ?
ah oui, la fête. il faut que je raconte la fête, après j'irais refaire mon bandage et j'irais me coucher à côté de l'autre enculé.
on était tous les cinq et on a bouffé des trips et on a bu pas mal de bières. on était dans un appart abandonné, c'était la zone, il n'y a avait pas d'électricité. on avait juste un poste pourri, qui ne diffusait que la radio, et des piles qui étaient en train de nous lâcher. on aurait pu sortir mais sans une thune à part se friter contre des connards il n'y a rien à faire. de toute façon l'alcool et tout ce qu'on avait pris avant ça nous avait bien calmé. on était tous dans le noir dans ce truc qui puait la pisse à picoler des bières tièdes en attendant que les trips montent et que la radio crève. c'est pas mal parti en couilles après. y'en a deux qui ont commencé à se battre pour rire, mais ça a énervé tout le monde, moi je commençais à avoir des hallus tactiles, à sentir des machins ramper sur ma peau ou à sentir mes muscles faire des trucs. les autres commençaient à aller mal eux aussi, il y en avait un qui voulait choper une hache et aller découper quelqu'un, mais où voulait-il choper une hache ce con ? et la bière tournait toujours, à croire que c'était inépuisable.
c'est la radio qui est morte en premier, alors qu'on était tous éclatés en train de triper et de rire méchammant, et l'autre tournait en rond en parlant de découper un connard avec une hache. c'est à ce moment-là que quelqu'un éclate la dernière bouteille de bière contre un mur, de la bière partout et tout le monde qui commence à délirer avec les tessons, un miracle que personne soit mort. l'autre fou qui fait mine (ou pas) de nous attaquer, il faut lui balancer des coups de pieds dans le bide pour qu'il se calme, on s'acharne un peu tous sur lui en rigolant, et puis il arrête de vouloir se battre, je crois qu'il a mal aux couilles.
moi je commence à avoir des hallus visuelles, des taches, des trucs lumineux, les autres bougent plus beaucoup, chacun chez soi, et ça dure un moment comme ça. et puis il y en a un qui suggère d'aller choper de l'alcool quelque part, alors on sort. on traverse des rues désertes, on s'embrouille à cause de l'autre dingue qui plante son tesson dans sa jambe et se met à pisser le sang, on se fout de sa gueule et puis on le laisse là.
la fête est finie, moi je sens que le bad trip me guette, on se sépare, moi je part avec l'enculé qui dort maintenant par terre, et on se trouve ce petit squatt dans les beaux quartiers.
bon qu'est-ce qu'il y a à raconter maintenant ?
j'ai sommeil.
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10. saveurs molles, jour 2

le pape se masturbe dans des draps blancs
il se masturbe parce qu'il a peur de mourir
son éjaculation blanche ne contraste pas beaucoup avec la blancheur du drap
le sexe du pape est très frippé
le pape est âgé de quatre vingt seize ans
le pape n'a jamais connu de femme mais il connais des tas de moyens de jouir
le pape n'a jamais connu non plus d'homme
le pape n'a connu que lui-même depuis toujours
le pape ramène sa main ridée et tâchée de blanc devant ses yeux
il ne voit presque plus rien
il renifle l'odeur un peu salée de ce qui souille sa main
le pape aimerait sourire mais les muscles de son visage sont trop faibles à cette heure-ci
le pape est content d'avoir encore une fois niqué la mort
il regarde ses testicules secs et son pénis flaccide et ridé
il regarde la maigre tâche sur le drap
il regarde la lune dehors
il se demande si la prochaine fois il pourra
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11. saveurs molles, jour 2

au journal porno d'aujourd'hui :
- le clonage de Bill Gates II, la cérémonie est la même qu'il y a douze ans.
- l'arrestation d'un ancien manequin devenu grand couturier puis tueur en série. il a kidnappé puis assassiné plusieurs mannequins, les privant de parties du corps qu'elles avaient fait assurer des fortunes. son mobile était de construire, à partir de ces précieux fragments, le top-model parfait. on estime que ces crimes vont coûter aux assurances plusieurs milliards d'euros, et pourraient bien déclencher une crise financière majeure.
- le pape de la finance, Jeffrey Koolberg, s'est suicidé hier soir d'une bien étrange manière : il a avalé de l'essence et s'est immolé par le feu, de l'intérieur.
- la sortie du premier film nécrophile tourné sans trucage de toute l'histoire du cinéma. l'intrigue, très sommaire, tourne autour d'un bizutage qui tourne mal. la scène du gang-bang est d'ores et déjà un classique du piratage.
- le premier vol habité à destination de mars est un échec cuisant : par suite d'une intoxication alimentaire, les passagers arriveront à bon port, mais... morts. le vomi est-il sphérique en apesanteur ? en tout cas, cela prouve encore une fois la supériorité de la machine. aussitôt que leur clone de secours a été activé, les passagers ont déclaré vouloir poursuivre la compagnie de transport en justice. sans doute le feuileton de l'été.

ANNEXE :

le clonage est effectif depuis 2005.
les lois l'autorisant sont votées en 2009.
le coût est très élevé (il faut payer la technique, les assurances, les autorisations gouvernementales, plus des impots au montant énorme), de sorte que seuls les hommes d'états et quelques grands financiers y ont droit, plus quelques vedettes, enfin les habituels VIP.
quelques compagnies d'assurance tentent de populariser le clonage auprès de leurs clients, mais le coût est pour l'instant rédhibitoire.
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13. saveurs molles, jour 2

centre de retraitement des vagabonds, paris III.
la pièce est toute en longueur. le sol est incurvé vers le centre, séparé en deux par une rigole ; au centre de la rigole, une grille d'évacuation d'environ dix centimètres sur dix.
suspendus par les pieds à des chaînes rattachées au plafond, quarante huit sdf nus, les bras entravés dans le dos, pendent comme des cochons, la tête à un mètre vingt du sol. la capacité maximale de la pièce est de quatre vingt dix sdf, mais la rafle de ce soir n'as pas permis d’atteindre ce chiffre.
un homme vêtu d'une combinaison blanche entre par la seule porte. à son arrivée les sdf s'agitent, proie à la panique malgré les sédatifs qui les assomment. les voix se mélangent, et les mouvements font tinter les chaînes. le spectacle, assez macabre, ne semble pas émouvoir le fonctionnaire, qui s'approche du premier sdf tout en tirant de sa combinaison un long couteau très effilé, un genre de baïonnette, long de quarante-cinq centimètres. il l'immobilise d'une main, d'un geste ferme, le maintient un instant, et de l'autre main, malgré un grand cri de peur qui jaillit du sdf, plonge le couteau dans la gorge et ouvre latéralement ; le cri se transforme en gargouillis,
puis en silence, et le sang bouillonne hors de la blessure, éclabousse tout, les vêtements, les autres sdf, et s'en va couler vers la rigole. un silence puant vient de s'abattre dans la pièce. et ça continue comme ça quarante-sept fois encore ; dans les cris gargouillement bouillonnement appels au secours gestes mécaniques sang qui coule.
quand enfin ils sont tous mort, le fonctionnaire a terminé son boulot ; il a mal au bras et il a faim, il a aussi besoin d'une douche. ses vêtements seront incinérés ; quant aux cadavres, ils seront traités.

ANNEXES :

1 :

les centres de retraitement ont été inaugurés en 2010, après la ferméture des états à toute immigration. une fois les derniers clandestins expulsés, une fois les frontières sécurisées, et une fois votées les lois permettant l'exécution sommaire des résidants clandestins, il fallait rentabiliser les anciens centres de détentions réservés aux immigrés en situation illégale.
les centres de retraitement étaient nés. après le rétablissement de la peine capitable, ils ont concernés tous les criminels prix en flagrant délit d'un crime puni mort ; les lois se sont durcies, et ces criminels-là n'ayant plus droit à un procès, les centre de retraitement sont devenus des centre d'exécution.
puis les crimes et délits passibles de mort se sont accrus, jusqu'au vagabondage, qui fait maintenant l'objet de mesures strictes : tous sont répertoriés, bagués, fichés ; au moindre délit constaté (plainte ou flagrant délit), la peine mort est appliquée.
finalement il a fallu construire de nouveaux centres de retraitement, et l'état en a profité pour les faire plus fiables, plus hygiéniques, et plus acceptables socialement. désormais, ils seraient enterrés vingt-cinq mètre sous terre.
en 2016, un an après l'ouverture des nouveaux centres, il y a une grève du personnel d'exécution : ceux qui travaillent dans les anciens centres trouvent inadmissible leurs conditions de travail, ils sont très vite été soutenus par leurs collègue des nouveaux centres. cette grève marque les esprit : à l'image des cultivateurs du siècle dernier qui déversaient des tombereaux de fruits avariés sur les routes, le personnel d'exécution fait de même avec les très nombreux cadavre. l'état, obligé de cêder, contruit de nouveaux centres et réforme les anciens, qui pour la plupart deviennent des écoles primaires ou des crèches.

2 :

- les corps sont vidés de leur sang
- le sang, récupéré, sert de nourriture pour les animaux de consommation courante : veaux et boeufs en batterie, etc.
- la peau est stockée et utilisée comme isolant dans de nombreuses usines.
- les organes sont classés et triés ; ceux qui sont intacts sont greffés, ceux qui sont hors d'usage sont légués à la recherche ou aux universités.
- les os, dents et autres matières dures sont stockées, recyclées, et réutilisées comme matières premières dans un très grand nombre de domaines.
- tous les effets personnels sont détruits, à l'exception des bijoux qui sont remis en circulation : leur vente finance, en partie, le fonctionnement des centres.
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14. saveurs molles, jour 3

quelqu'un est entré dans la maison.
une nuit, sans témoin, quelqu'un est entré dans la maison ; une nuit le parquet a grincé, pour la première fois depuis le onze août 2016 ; une nuit des voix de sont élevées dans l'air lourd de la maison.
quelqu'un a ouvert la trappe.
une nuit, dans le silence des voix retombées et dans l'obscurité des torches éteintes, le bruit sec d'une clef qui ouvre un cadenas a claqué dans l'air lourd ; une nuit le grincement de charnières puissantes mais rouillées a longtemps duré dans l'air lourd de la maison ; une nuit, pour la première fois depuis le treize février 2013, des yeux ont appréhendé la raideur des marches qui conduisent sous le sol de la maison.
quelqu'un a fouillé la cave.
une nuit, dans l'atmosphère pesante et à la lueur de la torche, quelqu'un a vu les dessins tracés à la craie sur le sol de la cave ; une nuit, des mains rendues moites par l'inquiétude ont tatonné sur les murs à la recherche d'un passage ; une nuit, des lèvres rendues tremblantes par la peur ont murmuré des mots dans un micro grossièrement dissimulé ; une nuit, pour la première fois depuis le douze février 2013, un moteur s'est mis en marche.
quelqu'un a continué.
plus loin, plus bas. quelqu'un est arrivé tout au fond, tout en bas. là où personne n'était allé depuis le onze février 2013. et quelqu'un a vu.
quelqu'un n'est pas revenu.
tout au fond, tout en bas, quelqu'un est resté. et quelque chose qui n'était pas sorti de son trou depuis le seize septembre 1992 est sorti de son trou, et quelques heures plus tard cette chose est retournée tout au fond de son trou.
quelques heures plus tard, il est six heures du matin. les photographes de la police, des filtre à air sur le visage, flashent obsessionnellement.
baptiste mattéïs est debout dans un coin, il ne comprend pas grand chose. il contemple les pièces à conviction d'un air écoeuré. les pièces à convictions, ce sont pour l'essentiel des ossements d'enfant, qui remplissaient les tiroirs, les coffres et les étagères de tous les meubles. en première approximation, tous ces ossements pourraient appartenir à plus de trente cadavres âgés de six à douze ans.
des agents ont effectués des sondages dans les murs et au plafond, les résultats laissent penser à la présence, ici aussi, d'ossements.
le cadavre, retrouvé dans une pièce attenante à la cave, est un des principaux suspects de l'affaire.
le remplaçant du commissaire, bloqué à cause des grèves, a donné des ordres par téléphone. manifestement, le ministère de l'intérieur veut couvrir certains suspects hauts placés.
Baptise mattéïsil sort de la maison pour prendre l'air un instant. il remarque le vieil homme, sur le perron de son pavillon, qui lui sourit. il lui rend ce sourire, unique événement agréable d'une journée de merde.
quelqu'un crie : il y a en a un qui est vivant !
un quoi se demande l'inspecteur. il cesse de sourire.

et dans moins de trente heures, la guerre civile va commencer à cause d'un couple d'amoureux dont personne n'a rien à foutre. pour l'instant, ils s'échangent des billets doux dans un ancien camp de détention transformé en salle de classe.

ANNEXES :

1:

il se lève tôt. à son âge, on ne dort plus beaucoup. il enfile ses pantoufles et traine des pieds jusqu'à la salle de bain. il pisse dans le lavabo, c'est son seul plaisir de veuf.
il traine ensuite des pieds jusqu'au perron, où il récupère le journal. il fait le tour du pavillon, pour ouvrir tous les volets. le soleil ne rentre pas, il est trop tôt. il sera là dans deux heures, et dans trois heures ce sera le facteur.
il déplie le journal, assis à la table de la cuisine, il le lit en écoutant gargouiller le café. avant il écoutait la radio, et puis un jour les piles sont mortes, c'était il y a six ans, trois ans avant c'était sa femme.
il n'y a rien de très intéressant, à part la rubrique nécrologique, qu'il parcours avec gourmandise. il ne se passe pas une journée sans qu'il ne découvre quelqu'un qu'il connaît. généralement, ça le réjouit. il a eu une telle peine quand ça femme est morte, que ça l'a guéri de toute autre tristesse. il laisse échapper un rire, il se sert un café.
il retourne à la chambre ; des menues corvées l'occupent, l'emmènent jusqu'à midi. à midi il se prépare à manger, c'est pas lourd, et il mange en se souvenant d'avant.
la journée passe, il n'y a pas de rythme, juste une platitude qui précède une autre, et le crépuscule pour finir, les volets à fermer, et il faut se coucher. au lit, avant de s'endormir, il relit le journal, ou quelquefois les vieilles lettres de sa femme.
il dépose son dentier, éteint la petite lumière, et s'allonge.
ses yeux brillent quelques secondes dans le noir relatif, les murs vibrent au passage du train de vingt-trois heures dix, et les yeux ne brillent plus : les paupières sont tombées sur une journée sans age.

2 :

- tu as voulu nous quitter espèce d'enculé ?
(on reconnait la voix d'une fille célèbre du porno journal, beaucoup seraient choqués de l'entendre parler ainsi)
- nnnoooggrlrlr !
- tu vas voir, espèce de fils de pute, ce qu'on va te faire !
(ça c'est un homme politique assez connu)
la fille tire un couteau, l'homme prononce des mots aux intonations menaçantes.
avec le couteau, la fille dessine sur le corps du prisonnier.
-nnonnkhhkhknnhhp
(il tente de parler mais la douleur rend la chose difficile)
l'homme se tait.
la victime gargouille.
la fille lèche le sang, elle a l'air un peu folle.
l'homme et la fille poussent la victime contre un mur ; il s'y englue comme dans des sables mouvants ; ses yeux s'exorbitent, il essaie de hurler, il ne peut toujours pas ; il disparaît complêtement dans le mur.
- une bonne chose de faite, dit l'homme.

3 :

les trois hommes et la femme montent des marches en bois, visiblement épuisés, très sales. leurs yeux sont hagards. la femme a les bras ballants, les deux hommes portent dans leurs bras, chacuns, deux enfants vidés de leur sang. les corps sont très légers. les vêtements sont lacérés et brunis de sang, les organes génitaux ont disparu, les lèvres sont couvertes d'entailles, des yeux crevés il ne reste que des orbites sèches et blanchâtres. diverses souillures d'origine organique maculent les corps.
ils parviennent en haut de l'escalier.
une lumière très faible pénètre par une des fenêtres, filtrée par la poussière.
la femme ouvre une armoire, les deux hommes y déposent les corps. ensuite, tous se débarrassent de leurs vêtements cérémoniaux, et revêtent leurs habits de ville. cependant, ils gardent leur anneau à l'index, un anneau d'étain banal en apparence.

4 :

la pièce, circulaire, est sommairement meublée d’une simple armoire d’aggloméré, du genre qu’on peut acheter dans n’importe quelle grande surface.
deux hommes nus et entièrement rasés se tiennent debout, à l’intérieur d’un cercle dessiné à la craie bleue. l’atmosphère de la pièce est chargée d’humidité, et des cônes d’encens disposés en grand nombre diffusent une fumée blanche et très aromatique. la peau des hommes perle de sueur. Ils récitent un dialogue. le rythme de leurs phrases suggèrent une structure en question réponses. lorsque le dialogue prend fin, celui qui semblait interroger se rend jusqu’au meuble. ll en sort un couteau entièrement d’acier, à la facture simple, un sachet de poudre sombre, et un deuxième sachet, rempli de viande sanguinolente. ll revient dans le cercle. ll dépose le couteau au centre approximatif, entre son partenaire et lui. le dialogue reprend. au bout de quelques minutes, il ouvre le sachet contenant de la poudre et en verse une partie sur le couteau. ce qui reste, il le partage en deux parts, qu’ils absorbent rapidement. Le dialogue reprend pendant quelques minutes, le nom de bill gates II est clairement prononcé. les pupilles des deux hommes sont très dilatées, et leur transpiration plus abondante. leur voix est moins assurée, et les intonations moins franche. ils interrompent une nouvelle fois le dialogue, et versent la viande crue sur le couteau. quelques gouttes de sang leur éclaboussent les pieds. ils prélèvent une part de viande, qu’ils se frottent sur le visage et contre les organes génitaux, ensuite ils remettent la viande sur le couteau. le dialogue reprend. leur voix est maintenant très nettement pâteuse, et ils ont des difficultés à articuler. ils transpirent abondamment, et leurs muscles des bras et des cuisses subissent des contractions non volontaires. la fumée d’encens opacifie considérablement la pièce. le nom de bill gates II est à nouveau prononcé.
plus tard, une jeune femme les rejoint.

5 :

la créature a revêtu une apparence humaine ; les sorciers la regardent avec dans les yeux de l'amour. tous les quatre (les deux sorciers, la sorcière et la créature), viennent de s'accoupler, non seulement dans un but de plaisir, mais aussi dans l'espoir de créer un être nouveau.
la créature, ils ne savent pas au juste d'où elle vient, mais elle leur apporte le pouvoir. depuis qu'ils lui offrent du plaisir sexuel, la créature a fait de l'un d'eux un acteur célèbre, d'un autre un homme politique en vue, de la troisième une présentatrice très appréciée du porno-journal.
le seul problème, c'est la question du pouvoir. tous les trois le sentent circuler dans leurs veines, le sentent battre à leurs tempes et ennivrer leurs cerveaux ; il en faut plus toujours plus. la créature change aussi, elle aussi devient victime de cette soif.

6 :

pierre decaux contemple pensivement la petite porte. la peur l'excitation de ce moment lui fait même oublier les trois cadavres d'enfants, et les problèmes évidents qu'ils posent. il n'y pense pas, ses yeux et son esprit sont rivés à la porte.
c'est son père qui l'a emmené ici pour la première fois. il lui a dit : "un jour, petit, tout ça sera à toi." ensuite il a ouvert sa braguette et approché ce qui en sortait de la bouche de son enfant. il l'a violé doucement, avec tout l'amour qu'il pouvait lui offrir.
pierre decaux a grandi, et a préféré ne pas avoir d'enfants. mais cela l'oblige à tuer ceux qu'il amène ici. ce qui s'est, finalement, révélé une bonne chose.
il tire la clef de sa poche, la considère longuement. elle est anodine, et même les signes qui l'ornent pourraient passer pour une coquêterie de l'artisan. il n'en est rien. il ouvre la petite porte. derrière, il n'y a rien, enfin il semble. juste un débarras plein de poussière, et un tuyau, comme un tuyau de gaz, qui traverse. il en émane un chaleur douce, et un son presque organique.

7 :

il murmure :
moi aussi, moi aussi, par pitié moi aussi... par pitié, par pitié, moi aussi...

8 :

(extrait d'un carnet de baptiste mattéïs)
(...)
traffic d'organes ?
traffic d'enfants - achats d'enfants par ue organisation : témoignages ? (rumeur)
à quoi servent-ils : traffic d'organes - clonage - loisirs (sexe ? quoi d'autre ?)
il existerait un zoo humain en pologne (réinterroger C. demander précisions. crédible ?)
vidéos / internet / vente d'objets souillés - cf. dossier 3
ministre de l'intérieur ? services spéciaux ?
(...)

9 : baptiste mattéïs

pour le commissaire, rien de changé. ça me rend triste, j'ai l'impression de voir mon père.
j'ai été le voir hier, je lui ai parlé. ça m'a mis en colère, je lui en veux presque d'être absent, d'être dans le coma. je me sens désemparé, surtout avec un dossier aussi sordide et aussi pourri. tout le monde me lâche. mes collèges refusent de m'aider, mon pseudo supérieur, depuis paris, me fout des bâtons dans les roues, tout le monde fait tout pour ralentir mon travail, j'en peux plus... j'ai même reçu un coup de téléphone d'intimidation.
j'en ai rien à foutre. même si l'enquête n'aboutit pas, je vais constituer un dossier. je vais tout mettre ici. les gens vont savoir, je ne peux pas garder de telles horreurs pour moi.
hier, j'ai tout raconté au commissaire. puérilement, j'espérai que l'indignation le ferait sortir du coma. peine perdue, évidemment.
aujourd'hui, l'enquête était très étrange. j'ai enfin eu l'autorisation fracturer la maison du 12 rue nicolas flamel. il a fallu que je fasse un quasi scandale chez le juge, mais il me l'a signé, ce foutu papier.
c'était horrible ce qu'on a trouvé là-bas, horrible. je ne peux même pas en parler ici. c'était terrifiant. et pourtant j'en ai vu.
et cet homme, il était vivant, mais dans quel état... il est mort dans nos bras, à peine a-t-il été dégagé, qu'il est mort... de faim, d'après le médecin légiste...
il faudra enquêter, savoir qui c'est. son visage était mutilé, mais il m'a semblé le reconnaître. peut-être est-il fiché, il faudra que je me renseigne.
je n'en peux plus. le seul à qui je peux parler, c'est le commissaire. tu parles. il ne m'écoute même pas, le seul truc qui me répond, c'est le bipbip de la respiration artificielle. quelle merde, je suis un raté total. pourquoi est-ce que je m'obstine dans cette poisse où tout le monde est mouillé ? des gens importants, peut-être même des ministres...
je devrais tout raccrocher avant de me faire descendre...
je suis fatigué, en fait, je ne pense plus qu'à ça. je ne sors pas du travail. quand je suis chez moi, j'y pense, je regarde les pistes, je compare les témoignages, j'appelle des gens avec mon téléphone privé. même au bureau, je laisse tomber les autres dossiers, tout se casse la gueule, si je me fais pas descendre de toute façon je vais me faire virer. je me demande pourquoi je fais ça... j'ai juste besoin de dormir.
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